Depuis le printemps 2020, l’interminable pandémie du coronavirus égratigne, voire altère en profondeur la santé mentale de bien des adolescents et des jeunes adultes. Impossible de prévoir ce qui sera transitoire ou durera!

Quelles en sont les causes?

Les causes en sont multiples, à commencer par le facteur interne ultime : la sensibilité et la prédisposition individuelles à s’ouvrir ou non aux paroles et aux événements et à les analyser sur un mode optimiste, réaliste ou pessimiste.


Au rang des causes externes qui impactent cette réceptivité variable, on cite d’abord souvent la restriction erratique des contacts sociaux, si « réconfortants » et structurants à ces âges. Mais il y aussi les restrictions apportées au besoin de bouger, celles en approvisionnement cognitif et en distractions de qualité, au profit des séries TV, réseaux sociaux et autre jeux vidéo qui anesthésient la créativité. On doit mentionner encore l’ effondrement de nombre de cadres qui, en temps ordinaire, balisent la vie quotidienne de façon prévisible: cadre scolaire ou universitaire, cadre des clubs sportifs et des mouvements de jeunesse et même jusqu’à un certain point, cadre des rites familiaux. Par ailleurs, les ados, ni plus ni moins que nous tous, sont bombardés d’un fatras d’informations délétères et contradictoires ; les soi-disant maigres repères s’évanouissent régulièrement pour être volatilement remplacés par leur contraire... Bien des ados y ont perdu leur blindage, leur sentiment d’invincibilité et se laissent pénétrer par cette marée noire, avec la vulnérabilité et les difficultés de communication propres à leur âge. Au fond, le Père social, déjà diffusément contesté et affaibli dans nos sociétés contemporaines, n’a pas pu s’affirmer autour du corona, comme repère fort et cohérent, offrant sa consistance plus que son savoir. Cette déliquescence n’est pas pour rien dans la dépression existentielle qui envahit nombre de grands ados et de jeunes adultes, qui ne se voient plus d’avenir!

Les conséquences sur le terrain de la vie

 Les conséquences chez chacun de toutes ses restrictions, agressions et absences sont multiples.        
- Et d’abord, évitons les généralisations et les modes sensationnalistes : une partie des jeunes continuent à aller raisonnablement bien, comme d’habitude : les plus résilients, les plus philosophes, ceux qui sont bien entourés socialement... et peut-être aussi les plus béotiens, qui préfèrent  une bonne bière à de mauvaises nouvelles.
- Une minorité de jeunes fait la  politique de l’autruche, parfois pour refouler dans le bruit ses propres angoisses ; elle refuse toute restriction, fait la fête et hurle dans les manifestations.     
- La majorité silencieuse se déprime à bas bruit, envahie d’insécurité et de découragement pour le présent, sanitaire et social, et pour l’avenir : perte de créativité, décrochage cognitif et scolaire, évasions interminables sur les écrans, irritabilité, altération des cycles du sommeil... et pour certains aussi repli sur soi, jusqu’au syndrome de la cabane :  l’ado se sent peser deux tonnes et ne va même plus rendre visite à son meilleur ami tout proche. Et la psychopathologie peut encore se marquer davantage, jusqu’au suicide de quelques jeunes adultes qui se sentent « no life ». 
- Il ne faut pas sous-estimer non plus la présence d’angoisses excessives et déraisonnables. Elles existent seules en ordre principal ou sont mélangées au tableau dépressif du groupe précédent. Certains ados les gardent soigneusement secrètes, par honte ou par délicatesse ; d’autres n’en peuvent plus et les expriment de vive voix. 

- Enfin, ce mal-être peut-il engendrer un surcroît d'agressivité clair et net? On ne peut ni l'affirmer à coup sûr ni en rejeter l'idée. Ce peut être parmi d'autres, un facteur provoquant du passge à l'acte,  chez des jeunes déjà peu socialisés et manquant d'empathie. Ayant l'impression d'être laissés à eux-mêmes, avec le Père aux abonnés absents, ils peuvent se sentir poussés à se protéger et à régler leurs compte tous seuls. Explication (très) partielle de la montée de violence à laquelle on a assisté en france, entre ados eux-mêmes, depuis 2020.